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[exposition] Sacrés Rois ! A l’origine de l’exposition, les travaux des chercheurs

Christian Grappe, professeur de Nouveau Testament à la Faculté de théologie protestante de l’Université de Strasbourg, est à l’origine de l’exposition Sacrés Rois ! David et Salomon à travers les âges. Il nous raconte, dans ce billet, les fondements scientifiques du projet, les travaux menés et le long cheminement, débuté en 2015, qui ont permis d’aboutir à une mise en exposition de ce travail de recherche.

Christian Grappe à l’inauguration de l’exposition Sacrés Rois !

L’idée de l’exposition est née d’un cours que j’ai été amené à donner sur la présentation de Jésus en tant que nouveau David ou nouveau Salomon dans le Nouveau Testament. Pour comprendre cette présentation, il convenait de s’interroger d’abord, avec les étudiantes et les étudiants participant au cours, sur la manière dont avaient évolué les images respectives de David et Salomon depuis l’Ancien Testament jusqu’au Nouveau Testament, car ces images changent, se transforment ou encore se développent au fil du temps.

Or ce phénomène se produit déjà au sein de le Bible hébraïque elle-même, puisque l’histoire de David y est racontée d’abord dans les livres de Samuel et des Rois, puis dans les livres des Chroniques. Et on relève encore des différences entre le texte de la Bible hébraïque et celui de sa traduction grecque effectuée à Alexandrie (la Septante), différences qui nous renseignent elles aussi sur l’histoire de la réception du texte et les évolutions qu’il connaît au fil du temps ! La littérature intertestamentaire, dans laquelle j’inclus la documentation qumrânienne, constitue un jalon de plus entre les deux corpus que les chrétiens appellent l’Ancien Testament et le Nouveau Testament. Elle a en effet été rédigée pour une grande part entre le deuxième siècle avant notre ère et la fin du premier siècle de notre ère. Et cette littérature intertestamentaire peut être complétée par les écrits de l’historien juif Flavius Josèphe, qui nous permet d’accéder lui aussi à des traditions du plus haut intérêt. Il apparaît ainsi que l’on dispose d’écrits divers et successifs et que de l’un à l’autre, les images respectives de David et de Salomon évoluent, se recomposent, certaines montant en puissance ou connaissant des développements étonnants, d’autres étant laissées momentanément de côté tout en pouvant réapparaître plus tard…

L’évolution de ces images permet notamment de mieux comprendre pourquoi Jésus est appelé « Fils de David » dans des récits assez distincts. D’une part, les récits de son entrée à Jérusalem où il est acclamé ainsi en tant que messie prétendu, libérateur espéré pour chasser de Palestine l’occupant romain et rendre au peuple sa liberté. D’autre part, les récits de guérison dans lesquels il pourrait être apostrophé en tant que « Fils de David » parce que Salomon lui-même était fils de David et que s’était déjà développée au premier siècle de notre ère, une image de Salomon déjà présente en germe dans la Bible hébraïque, mais amplifiée dans la Septante et revêtant des aspects très concrets dans la littérature intertestamentaire et chez Flavius Josèphe, celle d’exorciste, de guérisseur et de magicien.

Mais pourquoi s’arrêter au Nouveau Testament ? L’histoire de la réception des figures des deux rois se poursuit au-delà et jusqu’à nos jours. Elle trouve, de fait, des prolongements multiples. Dans les jeux de cartes, dans lesquels le roi de pique n’est autre que David. Dans l’histoire politique, puisqu’une dynastie salomonienne a émergé en Éthiopie et que toutes les monarchies européennes se sont réclamées de l’héritage des deux rois et que même un président de la République nommé Jaïr Bolsonaro s’est fait oindre comme les rois d’Israël dans un Temple de Salomon construit par un évêque pentecôtiste au Brésil ! Dans la magie, encore puisque Salomon est devenu une des références absolues en la matière…

Toutes ces pistes, et bien d’autres encore, se présentant, nous en avons discuté au sein de notre unité de recherche et l’idée d’une possible exposition nous est venue.

Un beau jour, je me suis retrouvé à côté du directeur de la BNU dans le tram et je lui en ai présenté l’idée. Il a bien voulu accepter de se laisser convaincre et avec deux autres membres de l’unité de recherche « Théologie protestante », Régine Hunziker et Marc Vial, et trois commissaires de la BNU, Catherine Soulé-Sandic, Madeleine Zeller et Daniel Bornemann, une collaboration nouvelle, nourrie d’interdisciplinarité et enrichie de nouvelles compétences, a commencé pour penser et mettre en place ce qui a mené jusqu’à l’exposition qui vous est offerte aujourd’hui.


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Catherine Soulé-Sandic (30 octobre 2023). [exposition] Sacrés Rois ! A l’origine de l’exposition, les travaux des chercheurs. Lieu de recherche : le carnet de la Bnu. Consulté le 16 février 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/m4cu


Catherine Soulé-Sandic

Cheffe du département Arts, Langues, Littératures et Aires culturelles - Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg

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